Ma démarche artistique s'est construite autour de récits personnels, qu'ils soient biographiques comme ce qui en découle : l'auto-biographie, l'auto-fiction, le journal intime, mais aussi le témoignage ou l'interview. Je les écris ou les recueille auprès de personnes que je rencontre ou avec qui je collabore, tels des acteurs de la société, essentiellement sous forme de texte, enregistrements sonores ou captations filmiques.

Je questionne les notions de micro-histoire. En suivant le fil du destin particulier d’un individu, on
éclaire les caractéristiques du monde qui l’entoure. Limite s'inscrit dans la continuité de ce travail. En questionnant mes oncles et tantes ayant vécu sous l’État-Nouveau, j'ai tenté de retranscrire leurs souvenirs, leurs anecdotes de jeunesse. Se projeter dans leur vision du régime totalitaire, nous donne à voir la compréhension partiel qu'ils en avaient. Des éléments récurrents apparaissaient dans le discours de mes proches comme la mocidade portuguesa (jeunesse portugaise), ou la censure culturelle. Dans Limite, j'ai voulu donner une place centrale à la
musique très largement censurée mais aussi utilisée comme moyen de propagande. Elle fait écho aux souvenirs recueillis et c'est un élément indispensable lors de la libération du Portugal par les forces armées. Elle est omniprésente dans le scénario : par les chants de la mocidade portuguesa, à la radio, dans la rue, dans le tramway, grâce au magnétophone à cassette. Elle ouvre, accompagne et clos le film. 

Pour filmer ce récit, il serait intéressant d'y associer des images d'archives. Jouer avec la temporalité, remettre au présent un passé pas si lointain. Les images de la fin du régime évoquent de manière frappante les conflits mondiaux actuels, créant une proximité et une
familiarité avec le contemporain, le vivant. Utiliser des archives pour brouiller les repères, créer la
confusion des temporalités. De quel récit parle-t-on ? Un récit passé ? Le notre ?